- ASTRONOMIE ET ASTROPHYSIQUE
- ASTRONOMIE ET ASTROPHYSIQUEDe tout temps, l’homme a été attiré par la voûte céleste, mais pas toujours pour essayer d’en percer les mystères. Il y a des milliers d’années, l’observation des astres lui servait seulement à marquer des étapes dans le déroulement du temps. L’alternance des jours et des nuits, les changements dans les phases de la Lune et la position des planètes retinrent immédiatement son attention. Mais il eut tôt fait de remarquer également que le mouvement du Soleil parmi les étoiles marquait le retour des saisons, ce qui était d’une importance capitale pour les peuples agricoles. Les premières découvertes furent certainement très subjectives, mais elles incitèrent à rechercher la cause première des phénomènes. Cela conduisit à effectuer les premières mesures précises de la position des astres; purement contemplative à ses débuts, l’étude du ciel se transforma petit à petit en une véritable science.Les premières lois découvertes furent d’abord considérées comme dues à l’intervention d’êtres supérieurs et non comme des conséquences inéluctables d’autres lois gouvernant les relations des corps entre eux. L’homme attribua même pendant longtemps aux astres une action surnaturelle sur son existence même: la position des planètes dans le ciel, celle du Soleil le long du zodiaque, ou bien la phase de la Lune devaient marquer pour toujours la fatalité humaine. De là naquit l’astrologie. Malgré ses bases irrationnelles et antiscientifiques, l’astronomie lui doit beaucoup, en ce qu’elle suscita chez l’homme un intérêt considérable envers les astres. Jusqu’au XVIIe siècle, tous les grands astronomes étaient, peu ou prou, des astrologues, Kepler par exemple, pour ne citer qu’un nom illustre.L’astronomie s’est toujours distinguée nettement des autres sciences, car elle est par essence une science d’observation, et non une science expérimentale, comme la physique ou la chimie. L’astronome ne peut agir sur le milieu qu’il étudie, mais doit se contenter de l’observer de l’extérieur. Cela explique que les progrès de l’astronomie, plus que ceux d’aucune autre science, soient liés au développement des instruments d’observation.Le premier problème que se posèrent les astronomes fut d’expliquer le mouvement des astres sur la sphère céleste, particulièrement le mouvement du Soleil, de la Lune et des planètes. Mais, avant d’interpréter ces mouvements, il fut nécessaire d’accumuler patiemment un nombre considérable d’observations, étendues souvent sur plusieurs siècles. N’est-ce pas ce travail patient, précis et en apparence inutile, qui permit à Hipparque, dès le IIe siècle avant notre ère, de découvrir la précession des équinoxes en comparant une série déjà longue d’observations?Cette continuité est également l’un des traits particuliers à l’astronomie. L’échelle des temps en astronomie est souvent longue en comparaison de la durée de la vie humaine, et même de celle des civilisations. Un résultat ne pourra donc être obtenu que par la comparaison d’observations très précises effectuées à l’heure actuelle et dans les temps les plus reculés. La conséquence en est qu’aucune observation n’est jamais périmée en astronomie: malgré leur manque de précision par rapport aux observations actuelles, on a encore recours de nos jours aux descriptions des anciens astronomes et, en particulier, aux chroniques chinoises et coréennes, qui sont généralement précises et fiables.Le désir de vérifier les résultats de la mécanique céleste conduisit les astronomes à améliorer leurs instruments d’observation. En retour, ce progrès des instruments permit de découvrir des failles dans la mécanique classique de Newton, d’où devait naître la théorie de la relativité d’Einstein.Jusqu’au début du XIXe siècle, l’astronomie s’est presque exclusivement attachée à l’étude des mouvements des astres et, dans la dernière période, de la cause de ces mouvements, mais elle ne se préoccupait guère de la nature de ces astres. Lorsque les progrès de la physique ont permis d’envisager l’étude à distance des propriétés des étoiles, puis des autres objets de l’astronomie, l’astrophysique est née. Elle a suivi pendant quelques décennies une évolution indépendante de la vieille astronomie de position et de la mécanique céleste, puis ces branches se sont réunies; il conviendrait sans doute de ne plus employer aujourd’hui que le terme d’astronomie.Depuis le début du XXe siècle, l’astronomie connaît un développement prodigieux qui est lié aux spectaculaires progrès de la physique et des instruments d’observation. Les grands télescopes ont dominé la scène jusqu’aux environs de 1950; puis, l’apparition de nouveaux moyens d’observation, notamment dans le domaine radio, a permis entre 1950 et 1970 une moisson de découvertes inattendues qui ont renouvelé notre conception de l’Univers. L’exploration directe du système solaire et les satellites astronomiques s’y sont ajoutés pour accélérer encore le rythme des progrès de notre connaissance de l’Univers, tandis que les ordinateurs autorisent des analyses et simulations numériques ainsi qu’un raffinement dans le traitement des observations dont on ne pouvait rêver auparavant. Ce rythme ne risque guère de se ralentir: s’il est une science qui n’a jamais connu et ne connaîtra pas de crise de développement, c’est bien l’astronomie.Mais il n’est pas possible d’envisager l’astronomie sous son seul aspect scientifique, car il n’est probablement pas d’activité humaine qui ait, plus qu’elle, influencé les grands penseurs. Les découvertes de l’astronomie ont profondément marqué de nombreuses doctrines philosophiques et religieuses, aussi bien dans les temps anciens qu’à l’heure actuelle. On peut d’ailleurs trouver dans cette influence deux courants opposés. Il est certain que les découvertes successives de l’astronomie ont singulièrement réduit l’importance de l’homme au sein de l’Univers. Pour les Anciens, la Terre était au centre de tout, et l’homme la plus parfaite des créatures. Copernic, au XVIe siècle, commença à détruire cette image en élaborant son système héliocentrique, que les philosophes et savants de son temps eurent tant de mal à admettre. Puis ce furent les découvertes de l’astronomie stellaire qui montrèrent que le Soleil lui-même n’était qu’une étoile quelconque semblable à des milliards d’autres et occupant, dans l’ensemble de la Galaxie, une position qui n’a rien de remarquable. Enfin, nous savons maintenant que des milliards de galaxies, formées de dizaines de milliards d’étoiles, peuplent l’Univers. Dans ces conditions, pourquoi l’homme serait-il un phénomène unique? L’astronome en est à rechercher d’autres créatures, habitant d’autres planètes.Mais, d’un autre point de vue, l’astronomie a peut-être plus que toute autre science démontré la puissance de l’esprit humain. L’homme n’a-t-il pas réussi, tout en restant rivé à sa planète, à mesurer avec précision la distance d’astres extrêmement éloignés, à déterminer leur composition chimique, et même à aborder le problème de l’origine et de l’évolution de l’Univers dans son ensemble?On peut étudier l’histoire de l’astronomie de deux points de vue assez différents. D’un côté, il y a l’astronomie en tant que science, dont on peut suivre les progrès à travers l’amélioration des instruments et la découverte d’astres nouveaux et de lois nouvelles. D’autre part, on peut relater l’histoire de la pensée astronomique ou, plus précisément, étudier comment a évolué, au cours des âges, la conception que l’homme se fait de l’Univers qui l’entoure. Nous n’examinerons ici que le premier point de vue.1. Les originesLes plus anciennes civilisations sur lesquelles nous possédons des informations occupent, entre 5000 et 4000 ans avant J.-C., les plaines fertiles de Chine, des Indes, de Mésopotamie et d’Égypte, mais c’est probablement en Mésopotamie, sur les bords du Tigre et de l’Euphrate, que l’observation des astres tint le plus de place.Vers 3000 avant J.-C., les villes sumériennes, comme Uruk, Nippur, au sud de la Mésopotamie, ont déjà une culture très développée, qui fut par la suite transmise aux Babyloniens situés plus au nord. Les Sumériens furent les inventeurs de l’écriture cunéiforme. Les tablettes les plus anciennes qui nous soient parvenues datent seulement de 2800 avant notre ère, mais elles montrent que l’astronomie était à l’honneur depuis longtemps déjà. Il nous est possible de reconstituer le calendrier utilisé à cette époque, et de suivre les efforts faits pour l’améliorer. Les Sumériens et les Babyloniens utilisent le calendrier lunaire, qui permet facilement de repérer les mois. Mais ce mois lunaire n’est pas un sous-multiple simple de l’année solaire, qui marque le retour des saisons et qu’utilise le cultivateur pour fixer l’époque des semailles ou de la moisson. Pourtant, les mois sont désignés par deux signes: par exemple, le quatrième mois est le mois des céréales et de la main (semences) et le onzième, le mois des céréales et de la faucille, le douzième, celui des céréales et de la maison. Douze mois lunaires ne correspondant pas à une année, il faut intercaler de temps à autre un mois supplémentaire pour retrouver la même saison. Nous avons la preuve que, déjà à Babylone, on utilisait ce mois intercalaire, que l’on plaçait à une époque quelconque, quand le décalage des saisons devenait trop sensible.Il est certain aussi que la définition du calendrier conduisit l’homme à observer les étoiles. Les levers et couchers héliaques des constellations (époques où elles deviennent visibles le matin, avant que le Soleil ne se lève, et époque où, le soir, elles deviennent invisibles car elles se couchent avant le Soleil) sont de bons repères pour marquer les périodes de l’année. On a retrouvé la liste de trente-six constellations déjà définies par les Babyloniens, et il est très probable qu’il faille voir là la première ébauche du zodiaque. Indépendamment, une astronomie semblable s’est développée en Amérique précolombienne, mais bien plus tard.Chez les peuples anciens, le ciel est bien autre chose qu’un objet de curiosité. L’homme est d’abord frappé par la régularité des phénomènes célestes, du retour sans cesse identique du Soleil, de l’alternance régulière des saisons ou des phases de la Lune. Il ne conçoit pas encore l’existence de lois physiques naturelles auxquelles obéirait le mouvement des astres. C’est un esprit essentiellement mystique, comme l’homme des civilisations primitives contemporaines, qui attribue cette régularité à l’action d’êtres supérieurs, de dieux tout-puissants. Cela donne naissance à un culte de ces divinités, culte qui provient d’abord d’un sentiment de crainte et est destiné à s’attirer les faveurs du ciel. La divinité s’identifie souvent d’ailleurs aux objets eux-mêmes: le Soleil qui donne sa chaleur et sa lumière, dieu favorable, la Lune, astre de la nuit, souvent considérée comme un dieu malfaisant, Vénus, etc. Les principaux événements astronomiques, nouvelle lune, début des saisons, etc., sont alors marqués par des cérémonies, dont il reste encore de nos jours de nombreuses traces. En outre, les événements inattendus, éclipses, comètes, bolides, novae et supernovae, etc., sont attribués à la colère divine.Ce culte des objets célestes conduit rapidement à attribuer à ces astres une influence sur la destinée humaine et donne naissance à l’astrologie qui, sauf peut-être chez les Grecs, a dominé, dans le monde entier, l’astronomie jusqu’à la Renaissance. Cette astrologie fut particulièrement développée à Babylone et en Extrême-Orient. Pour elle, les prêtres se mirent à étudier le ciel d’une manière plus précise, ajoutant à l’observation du Soleil et de la Lune celle des planètes, qui se déplacent parmi les étoiles.De même, les besoins de l’astrologie conduisirent aux premiers essais de prédiction des éclipses – cela nécessitait une étude approfondie des observations anciennes. On a ainsi retrouvé dans la bibliothèque d’Assurbanipal à Ninive (650 av. J.-C.) un grand nombre de tablettes astronomiques, dont les plus anciennes doivent remonter au XXe siècle avant J.-C. On y traite de la marche en zigzag des planètes, des constellations et de leur lever héliaque; on y trouve une description précise du zodiaque, tel que nous l’utilisons encore de nos jours; on y trouve aussi des tables donnant la liste des éclipses passées, et tentant de prédire celles à venir. Mais toutes ces observations sont accompagnées de prophéties propres aux astrologues, comme celles-ci:DIR\«En ce jour, la planète Mercure est visible. Quand Mercure est visible au mois de Kislou, il y aura des voleurs dans le pays. – Mars est entré dans la constellation d’Allul: cela ne comporte aucun présage.»/DIROn trouve en Extrême-Orient des prophéties semblables, qui portent aussi sur les événements célestes exceptionnels que les astronomes-astrologues étaient chargés de surveiller.Il devait revenir aux Grecs de dépouiller l’astronomie de cette gangue, et de la transformer en une véritable science.2. L’astronomie grecqueC’est sur les bords de la Méditerranée, dans la presqu’île hellénique, que s’épanouit la plus brillante civilisation de l’Antiquité. L’histoire grecque remonte certainement à plus d’un millénaire avant notre ère, mais nous ne possédons sur ces temps reculés que des documents de seconde main; aucun écrit antérieur au IVe siècle ne nous est parvenu, et il est parfois difficile de retrouver, au travers des commentaires de leurs successeurs, la pensée originale des premiers philosophes et savants.Pour l’esprit grec, la science du ciel, et celle de la nature en général, se dépouille rapidement de son aspect surnaturel: la raison recherche la vérité par ses moyens propres. C’est pourquoi la réflexion sur la nature de l’Univers prit chez lui plus d’importance que l’observation elle-même.L’école ionienneLe premier grand nom de la science grecque est celui de Thalès (640-562), fondateur de l’école ionienne, qui fleurit à Milet, en Asie Mineure, et dans l’île de Samos. Thalès a une cosmologie très primitive. La Terre est un disque circulaire flottant comme un morceau de bois sur une sorte d’océan dont la substance est source de tout et dont l’évaporation donne l’air. Anaximandre (611-545), disciple de Thalès, fit un progrès considérable en plaçant dans sa cosmologie la Terre, isolée dans l’espace, au centre de l’Univers, et en faisant tourner autour, sur des roues de différents diamètres, les divers astres. Il estima la distance de ces astres, mais sans aucune base scientifique, plaçant même les étoiles plus près de nous que le Soleil et la Lune.Un siècle et demi plus tard, l’école ionienne devait encore être illustrée par Anaxagore (499-428), qui eut l’intuition de génie que les planètes et la Lune étaient des corps solides analogues à la Terre et lancés dans l’espace comme des projectiles. Il en déduisit la première explication exacte des éclipses de Lune, par immersion de celle-ci dans l’ombre de la Terre.Vers la fin du VIe siècle, alors que l’école ionienne était en plein essor, Pythagore (env. 530 av. J.-C.) fondait en Italie méridionale une nouvelle école, qui devait briller pendant plus de deux siècles. Pour Pythagore et ses disciples, le nombre règle tout: art, musique, science, astronomie. Les distances des planètes forment une série «harmonique»; ce sont les rayons de sphères concentriques tournant autour de la Terre. Ce besoin d’harmonie mystique conduisit Parménide (540-450 env.) à supposer la Terre sphérique, car la sphère «est le volume le plus parfait». Il est à remarquer que ce n’est que plus tard que la forme sphérique de la Terre fut confirmée par des voyageurs ayant observé les changements d’aspect du ciel à mesure qu’ils descendaient vers le sud. Mais Parménide n’eut pas d’idées plus précises que ses prédécesseurs sur la position des planètes.Philolaos (450-400 env.) est sans aucun doute le pythagoricien le plus intéressant pour l’astronomie, par le système du monde qu’il proposa afin d’expliquer l’ensemble de l’Univers. Philolaos n’introduisit pas l’Univers héliocentrique, comme on l’affirme parfois. Le Soleil n’est qu’un astre tournant autour du feu central où trône Zeus. Mais la Terre devient aussi mobile, décrivant en vingt-quatre heures un cercle autour de ce feu, en présentant toujours la même face, où se trouve la Méditerranée, vers l’extérieur.Nous sommes déjà loin des cosmogonies primitives des Chaldéens ou des Égyptiens. Tous les astres, les étoiles exceptées peut-être, sont reconnus comme des corps sphériques en mouvement. La Terre elle-même, sphérique elle aussi, n’est pas forcément au centre de l’Univers. Ce sont les grandes découvertes des écoles ioniennes et pythagoriciennes.L’école d’AthènesAu IVe siècle, Athènes prend la relève. C’est le grand siècle de la civilisation grecque, celui de Platon, de Phidias, d’Eschyle, de Sophocle, d’Euripide, de Socrate et d’Aristote.Platon (427-347) est le fondateur et la grande lumière de la célèbre Académie, mais on ne peut le considérer comme un astronome, s’attachant à décrire des faits observés. Sa conception du monde ne constitue qu’un aspect de sa philosophie et, avec la Terre immobile au centre de tout, n’apporte rien de neuf. Mais si l’on en croit Simplicius, Platon eut le mérite de proposer à son élève Eudoxe (408-355) l’étude du mouvement des planètes et sa représentation par la seule utilisation de mouvements circulaires et uniformes, «seuls dignes de la perfection des corps célestes».Le système d’Eudoxe peut être considéré comme plus ingénieux que ceux, ultérieurs, d’Hipparque et de Ptolémée, en ce sens qu’il s’impose la condition de n’utiliser que des mouvements centrés sur la Terre. Les planètes, fixées sur l’équateur de sphères, sont entraînées par la rotation uniforme de celles-ci autour de pôles eux-mêmes mobiles, situés sur une sphère plus grande en rotation autour d’un axe différent du précédent. Une troisième sphère en rotation entraîne encore cet axe. Il est alors possible, en choisissant judicieusement les axes et les vitesses de rotation, de rendre compte du mouvement de la Lune et du Soleil. Il faut encore ajouter une sphère pour chaque planète afin d’expliquer les irrégularités de leur mouvement. Avec la sphère des étoiles, il faut alors à Eudoxe vingt-sept sphères, dont la nature n’est pas précisée. Ce système est bien imparfait, mais illustre la première tentative de représentation du mouvement des astres par des moyens purement géométriques, et doit être considéré comme l’origine de tous les systèmes qui, jusqu’à Copernic, furent utilisés pour prévoir le mouvement des astres.Aristote (384-322) devait être plus précis, réfléchissant sur la nature physique des sphères d’Eudoxe et sur la raison de leur mouvement. Mais cela le conduisit seulement à compliquer le système de son prédécesseur, en introduisant des mécaniques à rouages reliant les sphères les unes aux autres. Quant aux sphères elles-mêmes, elles étaient constituées «d’un gaz inconnu dont la propriété essentielle est de tourner d’un mouvement uniforme».Un pas beaucoup plus important devait être franchi par un successeur d’Aristote, Héraclide du Pont (388-315), qui eut le premier l’idée de faire tourner la Terre sur elle-même pour expliquer le mouvement des étoiles. C’était une hypothèse entièrement nouvelle, comparable en importance à celle de la sphéricité de la Terre. Il semble que l’on doive également à Héraclide une autre idée, géniale autant que révolutionnaire, celle de faire tourner Vénus autour du Soleil, et non plus autour de la Terre, pour en expliquer les variations d’éclat. Ainsi, petit à petit, notre globe perd son caractère immuable et privilégié, au centre de tout. Pour cela, Héraclide peut être considéré comme l’astronome le plus important de cette école d’Athènes qui devait encore être illustrée un siècle plus tard par Euclide.Mais, vers 350 avant J.-C., le flambeau passe de l’Hellade au delta du Nil. C’est là, à Alexandrie, que la culture hellénique devait survivre et encore briller pendant plus de cinq siècles.L’école d’AlexandrieAristarque de Samos (290 env.) est le premier grand astronome de l’école d’Alexandrie. C’est aussi le précurseur de Copernic, de dix-sept siècles en avance sur ses contemporains quand il affirme que la Terre, loin d’être fixe, non seulement tourne sur elle-même comme l’a proposé Héraclide, mais aussi décrit une orbite circulaire autour du Soleil, qui devient le centre de tous les mouvements. Cela explique l’alternance des saisons et simplifie considérablement le système des sphères d’Eudoxe. Malheureusement, l’intuition d’Aristarque ne devait pas avoir un grand retentissement, et c’est une autre théorie, celle des épicycles, qui devait faire la gloire de l’école d’Alexandrie pendant de nombreux siècles.L’école d’Alexandrie, plus que celles qui la précédèrent, est remarquable par la qualité de ses observations. Plus astronomes que philosophes, ses illustres membres s’attachèrent plutôt à l’explication précise des faits observés, c’est-à-dire à trouver un système simple permettant de rendre compte et de prévoir le mouvement des astres, sans se poser le problème de la réalité physique du système proposé.Les nouvelles observations faites pendant cinq siècles à Alexandrie aboutissent à la théorie décrite par Ptolémée (qui observe de 127 à 151 apr. J.-C.) dans le seul livre d’astronomie qui nous soit parvenu de cette époque, l’Almageste .Cette théorie, connue sous le nom de théorie des épicycles , fera loi jusqu’à Copernic, soit pendant quatorze siècles. Pourtant, elle est en retrait sur le modèle d’Aristarque. La Terre y est redevenue fixe au centre du Monde. La Lune et le Soleil gravitent autour d’elle sur des orbites circulaires. En revanche, l’originalité du système de Ptolémée est d’avoir abandonné l’idée des planètes se déplaçant sur des orbites circulaires. Ces dernières décrivent de petits cercles, les épicycles, d’un mouvement uniforme, tandis que le centre de l’épicycle est entraîné sur une orbite circulaire, le déférent. En choisissant convenablement les différents paramètres, on peut alors rendre compte des principales irrégularités du mouvement de chaque planète, et ce avec une très bonne approximation.L’étude de ce système est généralement portée au crédit de Ptolémée. Mais il est certain que, du point de vue purement astronomique, Hipparque est la plus grande gloire de l’école d’Alexandrie. Il effectua de nombreuses observations entre 160 et 120 avant J.-C. dans l’île de Rhodes. Mathématicien de génie, il fonda la trigonométrie, pour les besoins de l’astronomie. Il poussa très loin l’observation de la Lune, du Soleil et des planètes, et s’intéressa aussi aux étoiles, dont il dressa le premier catalogue. La qualité de ses observations lui permit de découvrir la précession des équinoxes.C’est également de l’école d’Alexandrie que nous sont parvenues les premières descriptions de mesures des dimensions et des distances des astres.Ératosthène (273-192 av. J.-C.) décrit une méthode de mesure du rayon terrestre consistant à mesurer l’ombre portée par deux objets de hauteur connue situés en deux points de latitude différente. La valeur qu’il trouve, 250 000 stades (46 000 km env.) pour la longueur du méridien, n’est que de peu supérieure à la valeur correcte.La distance de la Lune fut déterminée avec une bonne précision par Aristarque, puis par Hipparque, en mesurant les dimensions du cône d’ombre lors d’une éclipse de Lune. Ils purent ainsi démontrer que le diamètre de la Lune était égal au tiers du diamètre terrestre (valeur exacte du rapport: 0,27) et que sa distance était de soixante rayons terrestres.En revanche, les Anciens n’eurent aucun moyen de mesurer la distance du Soleil et des planètes. La valeur qu’ils en donnèrent, probablement calculée d’après la durée de leur révolution apparente, n’est pas toujours la même, principalement en ce qui concerne le Soleil et les planètes inférieures.La civilisation grecque est sans conteste à l’origine de la pensée scientifique. On lui doit, entre autres, d’avoir posé les bases des mathématiques indispensables au développement de l’astronomie. Cependant, il est un domaine dans lequel elle ne rencontre pas le succès: celui de l’origine des mouvements eux-mêmes, autrement dit de la mécanique céleste. La raison profonde en est, comme l’a noté Paul Couderc, «d’avoir admis que le repos est plus naturel que le mouvement». Ce n’est que longtemps plus tard, dans l’Europe renaissante, que Galilée et Descartes découvriront le principe de l’inertie, et surtout que Newton énoncera la loi de la gravitation universelle sur laquelle repose toute la mécanique céleste.3. La fin de l’AntiquitéLa civilisation grecque fut la plus brillante de l’Antiquité, mais les peuples helléniques ne réussirent pas à surmonter leurs querelles et à construire un empire assez solide pour s’opposer aux invasions. Après la disparition de la science grecque, aucun progrès notable ne devait voir le jour pendant de nombreux siècles.Les premiers conquérants venus du Latium transformèrent la Grèce en une province du grand Empire romain. Les Romains avaient un caractère beaucoup plus porté vers le commerce ou la politique que vers les œuvres de l’esprit, à l’exception des techniques à buts utilitaires. Leur mérite est d’avoir fait œuvre encyclopédique, en recopiant et en ordonnant les travaux des philosophes et astronomes grecs, mais sans y ajouter de note personnelle.Peut-être également faut-il citer Cléomède (Ier siècle av. J.-C.), très certainement d’origine grecque, qui mentionne pour la première fois la réfraction atmosphérique. Cléomède avait observé une éclipse de Lune, juste après son lever, alors que le Soleil était encore au-dessus de l’horizon, et attribua fort justement ce phénomène à la courbure des rayons lumineux traversant l’atmosphère terrestre. Citons aussi une description de la face de la Lune par Plutarque, qui considère celle-ci comme un astre identique à la Terre, couvert de montagnes.Enfin, nous sommes redevables aux Romains des bases de notre calendrier moderne. La nécessité d’avoir un calendrier bien établi pour régner sur un empire immense, et y fixer la date des fêtes et de la perception des impôts, conduisit Jules César, en 45 avant J.-C., à adapter un système qui est, à quelques retouches près, celui que nous utilisons de nos jours.Mais, assez curieusement, ce ne sont pas les Romains qui devaient nous transmettre l’héritage scientifique des Grecs, mais d’autres conquérants venus de l’Est, les Arabes. Ces derniers fondent, au VIIe siècle, un empire immense, s’étendant de la Perse à l’Espagne, et leur religion, l’islam, marque profondément tous les peuples qu’ils dominent; quand on parle d’astronomie arabe, il faut plutôt penser astronomie musulmane, en notant que les astronomes étaient non seulement des Arabes, mais des Syriens, des Juifs, des Persans ou des Espagnols.4. L’astronomie musulmaneCe n’est pas seulement par amour de la science que les Arabes cultivèrent l’astronomie; l’étude des astres leur était aussi indispensable pour prédire l’avenir: les Arabes furent avant tout des astrologues. Ils eurent d’abord besoin de méthodes de calcul et des tables déjà établies, et les découvrirent dans les ruines des bibliothèques byzantines, et aussi des Indes, où les astronomes grecs avaient de nombreux adeptes. Les astronomes arabes ne se contentèrent pas de recopier les travaux de leurs prédécesseurs; ils eurent le mérite de vouloir les vérifier par eux-mêmes. Pour cela, ils effectuèrent de nombreuses observations, et perfectionnèrent beaucoup les instruments. Ce furent surtout de bons observateurs, plutôt que de grands penseurs comme les Grecs. Leurs traductions et interprétations des traités d’astronomie grecs ont grandement aidé au renouveau de la science des astres en Europe.L’astronomie se développe au IXe siècle, et de puissants observatoires sont construits à Damas puis à Bagdad (829). Nous possédons de cette époque un traité d’astronomie de al-F rghani (Alfraganus), un des plus célèbres astronomes de son temps, traité qui fut traduit en latin au XIIe siècle et resta célèbre jusqu’à la Renaissance.Jafar Ab Ma’s face="EU Updot" 藍ar est surtout célèbre par son traité d’astrologie, mais l’astronome le plus doué fut certainement al-Batt ni (Albategnius), qui mourut en 928. On lui doit de nombreuses observations et divers procédés mathématiques nouveaux pour le calcul de la position des planètes.Au XIIIe siècle fut encore construit l’observatoire de Maraga (près de Tabriz, en Perse) et, au XVe, celui de Samarkand, qui devaient avoir leurs périodes de gloire.Les astronomes arabes nous ont laissé de nombreuses tables pour le calcul du mouvement des planètes (tables de al-Batt ni, tables hachémites, tables de Tolède, tables Alphonsines, etc.) qui furent en usage pendant tout le Moyen Âge, malgré leur très grande complexité due à l’utilisation du système de Ptolémée.5. Le Moyen ÂgeLes grandes invasions qui amenèrent la chute de l’Empire romain plongèrent l’Europe dans une léthargie intellectuelle qui devait durer presque un millénaire. Au début du Moyen Âge, toute tradition étant interrompue avec les «classiques» grecs, on ne trouve aucun intérêt pour la science. Seuls quelques moines cherchent encore à expliquer le mouvement des astres, avec quelques allusions à Aristote. Saint Augustin n’ignore pas la science grecque et ne la condamne pas. Mais, bientôt, une interprétation trop littérale des Écritures va conduire l’Église à rejeter toute idée ne reposant pas sur un géocentrisme absolu. Nombreux sont aussi les ouvrages rejetant la sphéricité de la Terre.Ce n’est qu’après 800, sous l’impulsion de Charlemagne, que la littérature romaine fait sa réapparition et, à travers elle, les idées des philosophes grecs. Mais on se contente alors de reproduire leurs ouvrages, avec de légères modifications pour les mettre au goût du jour. Cela a quand même pour conséquence d’éveiller l’intérêt de beaucoup pour la cosmogonie, et la science en général. Mais bien peu de travaux originaux voient le jour.Au XIIe siècle, l’influence d’Aristote commence à se faire sentir, se heurtant au début à l’hostilité de l’Église. Mais, curieux retour des choses, le philosophe grec va bientôt être admis et devenir le guide de tout savant jusqu’à la Renaissance. En 1254, ses écrits deviennent doctrine officielle à l’Université de Paris, et malheur à celui qui veut en modifier un iota. Cela va stériliser, pour quelques siècles encore, tout progrès scientifique. Il faut cependant citer le moine franciscain Roger Bacon (1214-1294), qui releva des imprécisions dans les écrits d’Aristote, introduisit les premiers raisonnements mathématiques et recommanda l’expérience comme la véritable source de la connaissance.6. La renaissance de l’astronomieAu milieu du XIVe siècle, la pensée grecque commence à éclairer à nouveau l’Occident. Totalement ignorée pendant de nombreux siècles, la langue d’Homère redevient à la mode parmi les intellectuels. On recherche et on traduit les textes anciens, principalement en Italie. La découverte de cette civilisation hellénique amène une renaissance non seulement des lettres et des arts, mais aussi de la science.En astronomie, ce renouveau est principalement attribuable à Copernic (1473-1543), bien que quelques précurseurs comme Nicolas de Cues (1401-1464), Regiomontanus (1436-1476) ou Calcagnini (1479-1541) soient dignes d’être cités.Ce n’est qu’en 1543, année de la mort de Copernic, que parut l’ouvrage dans lequel il expose sa conception du monde: De revolutionibus orbium cœlestium , ouvrage qui devait avoir plus que tout autre une influence sur la pensée humaine.C’est la première fois depuis Aristarque que l’on propose un système héliocentrique. Le Soleil devient le centre du monde. Les anciennes sphères du système de Ptolémée sont remplacées par des «orbes» solides qui entraînent chacune des planètes autour de lui. En particulier, la Terre tourne autour du Soleil en une année, et en même temps sur elle-même en vingt-quatre heures. La sphère des étoiles fixes est alors immobile, et «contient» tout l’Univers.Il faut bien remarquer que les conceptions de Copernic ne reposent pas sur des faits nouveaux. Copernic ne fut pas un grand observateur. Il fut très influencé par la métaphysique. Dans sa théorie, le Soleil est placé au centre du monde parce que c’est l’astre le plus brillant, celui qui fournit chaleur et lumière à la Terre. De même, Copernic considère le mouvement circulaire et uniforme comme seul possible (c’est «le plus parfait») et la rotation de la Terre sur elle-même comme un mouvement «naturel» qui, par conséquent, n’engendre pas de forces centrifuges nuisibles. Néanmoins, Copernic aboutit à un système beaucoup plus simple que celui de Ptolémée.Le génie de Copernic est d’avoir abandonné le dogme du géocentrisme. Dans la pratique astronomique courante, cela n’a apporté que peu de changement: le Soleil et la Terre échangeaient simplement leur place dans la combinaison des mouvements circulaires qui était censée représenter la machinerie de l’Univers. Cependant, l’adoption du Soleil comme centre du système planétaire devait se réveler une grande et féconde simplification sur le plan conceptuel et a ainsi autorisé les progrès ultérieurs. Le système de Copernic ne suscita pas au début l’opposition de l’Église, car on n’y voyait qu’une nouvelle méthode de calcul des tables des planètes; ce n’est que lorsqu’on réalisa qu’elle remettait en cause la physique d’Aristote que les ennuis commencèrent. Giordano Bruno, disciple de Copernic, qui eut l’audace d’émettre l’hypothèse que les étoiles étaient des astres semblables au Soleil, fut brûlé vif en 1600 et Galilée fut condamné en 1633.Copernic est, par son intuition et par la précision de ses calculs, l’initiateur de l’astronomie moderne. Mais les observations dont il disposait ne lui permettaient pas de découvrir les lois exactes qui régissent le mouvement des planètes. Cet honneur devait revenir à Kepler, qui put disposer des merveilleuses observations de Tycho Brahe (1546-1601).C’est à ce dernier que nous sommes redevables du renouveau de l’observation astronomique. Ce noble Danois, qui s’était d’abord destiné à une carrière juridique, brûla d’une passion sans pareille pour l’astronomie. Pourtant, le but initial de ses recherches était de préciser les lois astrologiques. Persuadé qu’il était de l’influence des astres sur les destinées humaines, il comprit que des observations plus précises étaient indispensables. Son livre De disciplinis mathematicis est consacré entièrement à l’astrologie, et il n’admit jamais le système de Copernic.Avec l’appui du roi Frédéric de Danemark, Tycho Brahe fit construire le premier observatoire digne de ce nom en Occident (d’autres existaient en Inde et en Chine), «Uraniborg», sur l’île de Hven, près de Copenhague. Il y poursuivit pendant vingt ans des observations systématiques du Soleil, de la Lune et des planètes. Il conçut et fit réaliser des instruments bien plus précis que ceux qui étaient utilisés jusqu’alors, lui permettant de meilleures mesures. Citons seulement les grands quadrants verticaux (plus de 2 m de rayon) pour mesurer la déclinaison des astres, les sextants et les armilles pour déterminer les angles et les coordonnées équatoriales des astres. Beaucoup plus peut-être que par leur originalité, les instruments de Tycho Brahe sont remarquables par la précision de leur construction. Grâce à lui, la précision des observations de position a augmenté d’un facteur dix, atteignant la minute d’angle.En octobre 1601, Tycho Brahe meurt à Prague, laissant tous ses cahiers à Kepler, qui avait été un de ses élèves pendant les dernières années de sa vie.Johannes Kepler (1571-1630) est aussi imprégné d’astrologie. Mais il est partisan du système de Copernic. Pour démontrer une curieuse hypothèse, de nature évidemment pythagoricienne, suivant laquelle les orbites planétaires auraient été associées aux polyèdres réguliers, il entreprit des calculs précis sur ces orbites, déterminant les rayons, les vitesses, les périodes, etc. D’une quantité innombrable de calculs devaient sortir, parmi beaucoup d’hypothèses des plus bizarres, les lois connues depuis sous le nom de lois de Kepler , lois qui rendent compte du mouvement des planètes autour du Soleil. Les orbites ne sont plus des cercles, mais des ellipses dont le Soleil occupe un des foyers, et Kepler relie la vitesse de rotation à la position de la planète sur l’ellipse, et sa période de révolution aux dimensions moyennes de cette ellipse. Kepler détermina le mouvement réel des planètes, à partir de leur mouvement apparent. Mais il n’entrevit pas la cause première de ce mouvement: la force de gravitation dont la découverte devait faire la gloire de Newton.Galilée (1564-1642) est peut-être un des hommes de science les plus complets qui aient existé. Mathématicien, physicien et astronome, il fut le véritable fondateur de la physique. Il entreprit les premières expériences sur la chute des corps, montrant que la vitesse horizontale d’un projectile se conserve (ce résultat sera généralisé plus tard par Descartes [1596-1650] dans le principe de l’inertie ). Mais, pour l’astronome, Galilée restera célèbre pour deux raisons: d’une part, comme héraut et martyr de la lutte de l’esprit scientifique contre les forces d’obscurantisme qui, à cette époque, étaient très vives dans une partie au moins de l’Église catholique; d’autre part, pour avoir introduit, en 1610, l’usage de la lunette pour l’observation astronomique. La lunette d’approche était déjà utilisée depuis quelques années quand Galilée en eut connaissance et songea à l’employer pour observer les astres.Sa première lunette, bien que très modeste (elle grossissait trois fois), lui révéla un nombre considérable de phénomènes insoupçonnés: des multitudes d’étoiles invisibles à l’œil nu, qui lui firent comprendre la vraie nature de la Voie lactée, les satellites de Jupiter et les phases de Vénus, qui témoignaient en faveur du système de Copernic. Puis, ce furent les taches et la rotation solaires, les cratères de la Lune, etc. Toutes ces observations sont à la base de nouveaux chapitres de l’astronomie.Mais la synthèse tentée pendant tant de siècles entre les phénomènes terrestres et célestes devait être l’œuvre, un demi-siècle plus tard, d’Isaac Newton (1643-1727). L’œuvre la plus importante de ce génie exceptionnel parut en 1687 sous le titre Philosophiae naturalis principia mathematica (Principes mathématiques de la philosophie naturelle ) et peut être considérée, avec le De revolutionibus de Copernic, comme une des œuvres les plus remarquables de l’esprit humain. On y trouve l’énoncé des trois principes de la mécanique: principe de l’inertie, loi de l’accélération F = m 塚, et principe de l’action et de la réaction. Puis, à partir des lois de Kepler, Newton remonte à la cause première, la loi initiale qui provoque le mouvement des planètes et aboutit à la loi de la gravitation universelle: «Deux corps quelconques s’attirent en raison directe de leurs masses, et en raison inverse du carré de la distance de leur centre de gravité.»Là réside la cause de la chute des corps sur la Terre, aussi bien que du mouvement des astres. La loi de la gravitation permet de calculer la position des planètes à un instant quelconque quand on connaît leur vitesse et leur position relatives à un instant donné.7. Du triomphe de la mécanique céleste à l’astrophysiqueL’œuvre de Newton devait passionner les cercles intellectuels du XVIIIe siècle, comme en témoigne par exemple l’intérêt actif de Voltaire et de la marquise du Châtelet. Cependant, on se souvenait que l’astronomie pouvait aussi avoir des applications pratiques directes et en particulier fournir aux marins le moyen de mesurer la longitude en mer: à une époque où les horloges transportables étaient déficientes, il fallait se servir de phénomènes naturels comme le mouvement de la Lune ou des satellites de Jupiter pour mesurer le temps, indispensable pour la détermination de la longitude. Il fallait donc étudier avec précision ces mouvements. C’est dans ce but utilitaire que furent fondés les premiers observatoires d’État, comme ceux de Greenwich et de Paris, dans la seconde moitié du XVIIe siècle. Les instruments d’observation se perfectionnèrent de façon considérable, ainsi que les horloges. Le XVIIIe siècle verra le triomphe de la mécanique céleste, dont le développement était nécessaire à la prédiction précise des mouvements des planètes, de leurs satellites et de la Lune : ce triomphe fut tel que la mécanique céleste deviendra le modèle de toutes les sciences exactes. Chose curieuse, tous ces efforts n’aboutirent pas à bien régler le problème de la détermination de la longitude en mer, qui ne connut une solution satisfaisante qu’avec la réalisation de chronomètres transportables de haute qualité, vers la fin du XVIIIe siècle. Cependant, le mouvement était lancé et devait aboutir au XIXe siècle à un développement très réussi: non seulement ce siècle connut l’apogée de la mécanique céleste, dont la découverte de Neptune par Le Verrier est l’épisode le plus connu, mais l’astronomie commença à s’organiser sur le plan international pour produire les premiers grands catalogues d’objets célestes. Nous ne nous étendrons pas sur cette période, qui est peut-être la mieux connue de l’histoire de l’astronomie.Au début du XIXe siècle, l’idée était bien ancrée – et Auguste Comte en fut le principal porte-parole – qu’il serait toujours impossible de connaître la composition chimique et les conditions physiques régnant dans les astres puisqu’on ne peut y aller voir, et a fortiori y pénétrer. Certains s’y résignaient, d’autres palliaient par leur imagination cette absence de connaissances, notamment en ce qui concerne les planètes: cela dura jusqu’à la fin du XIXe siècle – mais cette époque est-elle vraiment révolue? Cependant, certains physiciens commençaient à penser que la situation n’était pas désespérée. Vers 1850, plusieurs d’entre eux reconnurent dans les spectres du Soleil pris par Joseph von Fraunhofer les raies caractéristiques du sodium. Quelques années plus tard, Gustav Kirchhoff y reconnaissait plusieurs autres éléments et, grâce aux progrès de la spectroscopie, Henry Rowland en dénombrait trente-six en 1896. On avait même reconnu, dans les spectres du bord du Soleil obtenus au cours d’éclipses totales, des raies d’un élément inconnu sur la Terre, l’hélium, qui devait y être découvert ultérieurement. Des travaux spectroscopiques du même genre étaient effectués sur les étoiles, sur le gaz interstellaire qui forme certaines nébuleuses, comme celle d’Orion, et sur les comètes: William Huggins et le père Angelo Secchi furent les défricheurs de ce domaine, où la physique et l’astronomie s’épaulaient mutuellement. On peut alors parler d’astrophysique. Au début, astrophysique et astronomie classique (c’est-à-dire mesure des positions et mécanique céleste) se développèrent séparément et dans des endroits différents: c’est ainsi que Jules Janssen fonda en 1876 l’Observatoire d’astrophysique de Meudon, non loin du vénérable Observatoire de Paris. Ces deux observatoires devaient fusionner – et c’est révélateur de l’évolution des idées – en 1926.8. L’astronomie du XXe siècle1900-1950: l’ère des grands télescopesIl est quelque peu arbitraire de faire commencer cette période avec le début de notre siècle. Les premiers grands télescopes sont bien antérieurs. La tendance au gigantisme, amorcée dès la fin du XVIIIe siècle par William Herschel, aboutit en 1845 à la construction d’un télescope géant de 182 centimètres d’ouverture par William Parsons (lord Rosse). La qualité optique de ces instruments laissait à désirer, et c’est Léon Foucault qui construisit, dans la seconde moitié du XIXe siècle, les premiers télescopes de haute qualité à miroir de verre et non de bronze comme auparavant; le plus grand n’a cependant pas dépassé 80 centimètres d’ouverture. Parallèlement, on assistait à la construction d’une floraison de grandes lunettes, dont la lentille frontale atteignait presque 1 mètre de diamètre: c’étaient des instruments énormément encombrants et ils furent bientôt dépassés par les grands télescopes modernes. Le premier télescope géant, d’une ouverture de 2,50 m, fut installé en 1919 au mont Wilson, en Californie; il devait révolutionner l’astronomie, d’autant plus que lui étaient adjoints des spectrographes performants et que la technique de la photographie astronomique était déjà bien développée.Le début du XXe siècle a vu s’établir l’échelle de distance dans l’Univers. Auparavant, seules les distances des objets du système solaire et des étoiles les plus proches étaient connues. Le Hollandais Jacobus Cornelius Kapteyn imagina une méthode statistique permettant d’obtenir la distance des étoiles plus lointaines: en utilisant l’énorme quantité d’observations de positions accumulée au XIXe siècle, il fut le premier à donner en 1908 une idée raisonnable des véritables dimensions de notre Galaxie. Ainsi commençaient à se rejoindre astronomie et astrophysique. Puis, grâce à des observations d’étoiles variables pulsantes, les céphéides, avec de grands télescopes, on put connaître la distance de régions éloignées de notre Galaxie et des plus proches galaxies voisines, les Nuages de Magellan. Puis, grâce au télescope du mont Wilson, l’Américain Edwin P. Hubble réussit à montrer que les nébuleuses spirales étaient des galaxies lointaines semblables à la nôtre et à établir la relation entre le décalage vers le rouge de leurs raies spectrales et leur distance, qu’il attribua à une expansion générale de l’Univers. Ainsi naissait véritablement la cosmologie observationnelle.Il est intéressant de donner quelques aperçus sur les relations de l’astronomie et de la physique à cette époque. La physique atomique et moléculaire en était alors à ses balbutiements. En fait, on connaissait déjà bien, au début du XXe siècle, le spectre du Soleil, des étoiles, des nébuleuses gazeuses et des comètes. Ce qui manquait, c’était une théorie des spectres permettant de s’y retrouver dans un tel imbroglio de raies. Le modèle atomique de Bohr, qui date de 1913, fut un grand pas en avant dans cette direction, et, dès lors, l’analyse des spectres astronomiques devait suivre de près les progrès de la spectroscopie théorique et de laboratoire, et éventuellement y contribuer. C’est ainsi que furent identifiées certaines raies observées dans divers objets astronomiques, qui ne correspondent à aucune raie détectée au laboratoire. On réalisa alors que les conditions physiques qui règnent dans l’Univers peuvent différer à tel point de celles que l’on trouve dans les laboratoires terrestres que l’on peut considérer l’Univers comme un ensemble de laboratoires de physique où peuvent se produire des phénomènes entièrement nouveaux, phénomènes dont l’observation permet de grands apports à la physique proprement dite. Non moins excitantes furent les premières déterminations quantitatives de l’abondance des divers éléments dans les atmosphères stellaires à partir de l’intensité de leurs raies spectrales. Ces travaux, auxquels sont liés les noms d’Arthur Stanley Eddington, d’Albrecht Unsöld et d’autres, aboutirent vers la fin des années 1920; on réalisa alors que l’Univers est principalement constitué d’hydrogène et d’hélium, les éléments plus lourds étant peu abondants. Un vieux rêve – celui de connaître la composition des astres – était en train de se réaliser.Les relations entre l’astronomie et la physique nucléaire ont été tout à fait comparables. Qu’il suffise de mentionner ici que la découverte de l’origine de l’énergie libérée par le Soleil a suivi de peu celle de la possibilité des transmutations nucléaires (Ernest Rutherford, 1919): dès 1926, Eddington proposait, entre autres possibilités, que la conversion d’hydrogène en hélium pourrait produire l’énergie requise. L’explication détaillée devait cependant attendre d’autres progrès de la physique nucléaire et n’a été donnée que vers 1938 par l’Allemand Carl Friedrich von Weizsäcker et l’Américain Hans Albrecht Bethe. Il est clair qu’à cette époque l’astronomie a donné une impulsion au développement de la recherche nucléaire: pourquoi l’homme ne parviendrait-il pas à domestiquer l’énergie nucléaire, comme le font naturellement le Soleil et les étoiles?1950-1970: ouverture de nouveaux domainesLa Seconde Guerre mondiale fut pour l’astronomie une période de stagnation; cependant, les développements techniques réalisés dans des buts militaires, surtout en électronique, devaient changer peu après la face de l’astronomie. Ce sont eux qui ont permis le rapide développement de la radio-astronomie vers 1950. Certes, la découverte de l’émission radio de la Voie lactée ne datait pas d’hier, puisque l’Américain Karl Jansky la fit dès 1931. Cependant, elle fut presque ignorée à l’époque; mais, après la guerre, des ingénieurs radio et radar, assez disponibles, se mirent à construire dans des buts astronomiques, en se souvenant de cette découverte, des antennes et récepteurs radio de plus en plus sensibles. Ces développements se firent au sein de laboratoires de physique, à l’écart de la communauté astronomique traditionnelle: cela rappelle ce qui s’était passé un siècle plus tôt lors de la naissance de l’astrophysique. Cependant, les découvertes devaient survenir à un rythme rapide, stimulant l’intérêt des astronomes: ce fut d’abord la mise en évidence de la spectaculaire activité du Soleil en radio, puis l’observation des planètes qui révéla, entre autres, bien avant l’exploration spatiale, la température élevée du sol de Vénus. Mais, surtout, des catégories inattendues d’objets se manifestaient: les radiogalaxies – galaxies d’apparence normale mais émettant un flux radio très élevé –, puis en 1963 les quasars – qu’on sait aujourd’hui être des noyaux de galaxies extraordinairement actifs –, et en 1967 les pulsars. Ces derniers sont des étoiles extrêmement denses constituées principalement de neutrons, et il est intéressant de mentionner que les théoriciens avaient prévu leur existence trente ans avant leur découverte, d’ailleurs fortuite! Enfin, il faut mentionner la découverte en 1967 du rayonnement de l’Univers en ondes millimétriques : la mise en évidence de ce rayonnement, fossile des temps passés, a une importance pour la cosmologie aussi grande que celle de l’expansion de l’Univers, puisqu’elle confirme entièrement la vieille idée d’une «explosion» initiale, le big bang en anglais.La période 1950-1970 a vu les premiers balbutiements de l’astronomie spatiale. Beaucoup d’efforts, mais aussi beaucoup d’échecs et peu de résultats. Néanmoins, la persévérance des pionniers, qui encore une fois travaillaient en dehors des centres d’astronomie traditionnels, devait porter ses fruits dans la période suivante.Après 1970: l’ère de l’espace et des ordinateursBien qu’il soit difficile , faute de recul, d’émettre un jugement sur l’histoire contemporaine de l’astronomie, on peut en dégager quelques traits marquants. Le principal est certainement l’extraordinaire accélération du rythme auquel arrivent les résultats. Cette accélération résulte en grande partie de la mise en service de puissants moyens d’observation nouveaux, dont les satellites artificiels et les sondes spatiales sont certainement les plus spectaculaires. Elle résulte également de l’apparition et de la dissémination très rapide des ordinateurs, qui effectuent aisément les tâches de calcul les plus pénibles auxquelles étaient confrontés les astronomes des générations précédentes, mais ouvrent également d’immenses possibilités nouvelles. Enfin, il ne faut pas oublier la croissance très rapide du nombre de chercheurs, surtout dans les années 1960. Bien que cette croissance ait presque cessé, elle a été telle que la moitié des astronomes professionnels qui aient jamais existé sont aujourd’hui vivants! La moitié environ se trouvent aux États-Unis, ce qui explique en grande partie la suprématie américaine en astronomie, que l’on retrouve pour la même raison dans de nombreux domaines de la science.Le prodigieux développement de l’astronomie spatiale a permis, d’une part, l’exploration directe de presque tout le système solaire, exploration dont les résultats le plus souvent inattendus sont encore loin d’être «digérés» et compris, d’autre part, l’ouverture de l’ensemble des ondes électromagnétiques, alors que l’on ne pouvait auparavant en observer du sol qu’une faible partie (le visible, le proche infrarouge et les ondes radio). Rayons gamma, rayons X, ultraviolet et infrarouge lointains ont été observés par plusieurs satellites très performants, et aussi par des ballons et des avions spécialisés (moins puissants, mais moins coûteux). Des projets de satellites encore plus perfectionnés existent dans tous ces domaines. Même la vieille astronomie de position bénéficie de la recherche spatiale grâce au satellite européen Hipparcos, qui améliore de plusieurs ordres de grandeur la précision des mesures de position, atteignant le millième de seconde d’angle. Les techniques spatiales sont en pleine maturité. Les échecs deviennent rares, mais n’ont pas complètement disparu: nous citerons celui du satellite Galileo, qui est presque incapable de transmettre ses données au sol, ou, moins grave car réparable, celui du télescope spatial Hubble, qui ne donne pas les images de la qualité escomptée. L’ère est venue des véritables observatoires orbitaux, qui permettent à l’astronome de faire, depuis un centre de télécommunications spatiales et bientôt depuis son bureau, des observations dans l’espace en télécommandant un satellite, de la même manière qu’il actionne un télescope optique ou un radiotélescope. Cela n’est pas le moindre facteur qui provoque l’intégration de l’astronomie dans l’espace à l’astronomie classique.9. L’astronomie de demainJusqu’où ira le raffinement et la puissance des techniques et des méthodes de l’astronomie? Il est difficile de le prévoir. La tendance actuelle est à la fois au gigantisme et aussi à une complexité croissante des instruments. On veut voir toujours plus loin, donc des objets de plus en plus faibles, et les étudier dans tous leurs détails accessibles. Initialement, c’est dans les nouveaux domaines d’observation, radioastronomie et astronomie spatiale, que cette tendance a été la plus marquée, sans doute parce qu’on y était moins conservateur. Après le Very Large Array américain, radiotélescope géant formé d’un réseau de vingt-sept antennes mobiles, ont surgi au Japon et en Europe (dans le cadre d’une collaboration franco-hispano-allemande) de grands radiotélescopes et interféromètres en ondes millimétriques. Les États-Unis ne veulent pas être en reste dans la compétition: ils ont en construction un ensemble de radiotélescopes formant un réseau interférométrique à l’échelle nationale, réseau qui pourra devenir mondial avec l’adjonction d’antennes situées dans d’autres pays. Ils ont aussi pratiquement décidé la construction d’un grand interféromètre millimétrique qui devrait, dans les années 2000, concurrencer sérieusement les instruments déjà existants.Dans le domaine spatial, on a vu apparaître des réalisations de plus en plus grandioses, dont la plus connue et de loin la plus onéreuse est le télescope spatial Hubble. Les projets dont on parle, en particulier un radiotélescope spatial en ondes submillimétriques ou des instruments d’astronomie sur la Lune, sont tellement coûteux qu’ils deviennent impensables même dans le cadre national des États-Unis et nécessiteront sans doute des collaborations à l’échelle mondiale.L’astronomie optique n’est pas en reste, et on voit fleurir les projets de construction ainsi que les réalisations de télescopes optiques géants, de 8 à 10 m d’ouverture, et même de réseaux de télescopes géants interconnectés pour faire de l’interférométrie. Par exemple, un télescope de 10 m d’ouverture a été construit aux États-Unis, et, en 1993, on ne comptait pas moins de treize télescopes géants en construction ou en projet. Bien entendu, de tels projets dépassent le plus souvent les possibilités d’un seul pays et nécessitent, pour être menés à bien, des collaborations internationales. Les astronomes européens l’ont depuis longtemps compris: à côté de l’Agence spatiale européenne, qui a construit avec grand succès de nombreux satellites astronomiques, les astronomes se sont regroupés dans l’Observatoire européen austral, qui construit un réseau de quatre télescopes géants, et dans l’Institut de radioastronomie millimétrique franco-hispano-allemand. Les difficultés politiques ont pu être aplanies dans un cas comme dans l’autre; il est vrai qu’il s’agit d’une question de vie ou de mort face à la redoutable compétition américaine.À côté des télescopes géants, les méthodes d’observation elles-mêmes se sont diversifiées et ont fait des progrès spectaculaires. C’est ainsi qu’on sait maintenant résoudre des structures aussi fines que 50 millionièmes de seconde d’angle grâce aux interféromètres radio intercontinentaux; dans le domaine optique, ce devrait être pour bientôt grâce aussi aux interféromètres formés de plusieurs télescopes. On sait maintenant s’affranchir en très grande partie de la gêne apportée aux observations optiques par la turbulence de l’atmosphère terrestre et utiliser, grâce à des techniques bien au point (interférométrie des tavelures) ou qui commencent à l’être (optique adaptative), tout le pouvoir de résolution angulaire des télescopes optiques.Reste-t-il, à côté des instruments géants, une place pour de petites réalisations astucieuses, à l’échelle d’un pays, d’un observatoire ou même d’un individu? Certainement oui: on aura toujours besoin de petits instruments spécialisés à côté des monstres dont il vient d’être question. Les astronomes amateurs, par exemple, resteront irremplaçables pour l’étude de phénomènes variables, épisodiques ou imprévisibles. Par bonheur, les progrès dans les détecteurs sont tels qu’il devient possible de faire de l’astronomie de pointe avec des radiotélescopes ou des télescopes de petites dimensions, que l’on aurait pu croire caducs il y a quelques années. On peut donc prévoir que les décennies qui viennent verront la mise en œuvre, à côté des grands et très coûteux observatoires géants au sol et dans l’espace, d’instruments modestes où pourront se manifester l’originalité et l’invention de l’individu et d’où pourront sortir des découvertes spectaculaires. Il ne faut pas oublier que, dans l’histoire, les découvertes astronomiques les plus importantes ont suivi de près les innovations et les progrès techniques: contrairement aux autres sciences, l’astronomie, science d’observation, est étroitement tributaire de la technique. Cependant, on peut avoir l’impression que dans certains domaines une limite intrinsèque de détection (quantique par exemple) n’est pas loin d’être atteinte. Les progrès sont-ils terminés pour autant? Il n’en est rien. Dans d’autres domaines, nous n’en sommes qu’aux toutes premières détections, et un champ encore presque vierge s’ouvre à nous: c’est le cas par exemple de l’infrarouge lointain, des ondes submillimétriques et même millimétriques. Mais des astuces individuelles peuvent aussi contourner les limites apparentes dans des domaines plus classiques. Il faut donc mener de front instruments géants, surtout dans des domaines nouveaux, et petits projets spécialisés. La réussite de l’astronomie de demain sera fonction de l’équilibre entre ces tendances divergentes, et sera acquise si l’on ne cède ni à la tentation exagérée du gigantisme ni à celle de la dispersion.
Encyclopédie Universelle. 2012.